Agnès van Zanten, sociologue, réagit trois mois après les émeutes qui ont mis le feu à Nanterre. L’autrice de L’Ecole de la périphérie. Scolarité et ségrégation en banlieue (PUF, 442 pages, 14,99 euros), rappelle que le milieu social est le premier facteur d’inégalité dans les parcours scolaires et l’orientation.

Peut-on parler d’un échec de notre système scolaire ?

Le développement des enfants se différencie très tôt, dès l’âge d’un an, en fonction de leur milieu social. Ces différences sont liées aux inégalités de ressources économiques et culturelles des familles dans lesquelles ils grandissent. A Nanterre, beaucoup sont monoparentales, vivent dans une très grande précarité, avec un faible niveau d’études. Et malheureusement, à l’école, les inégalités n’y sont pas réduites. Par son action, le système éducatif français reproduit et parfois accentue ces inégalités. Les enseignants ne sont pas formés à gérer des classes avec des élèves qui ont un niveau hétérogène. Ils ont tendance à caler leur enseignement sur le milieu de classe, et les enfants les plus en difficulté ne sont pas pris en charge.

Pourtant Nanterre compte une dizaine d’écoles, et cinq collèges sur sept sont en réseau d’éducation prioritaire (REP) ou en REP+, avec des moyens supplémentaires…

L’Etat français n’a pas abandonné ces banlieues ni les établissements scolaires qui s’y trouvent. Une grande partie des investissements en REPa consisté à réduire le nombre d’élèves par classe. L’effet attendu de cette mesure est de permettre aux enseignants d’avoir un accompagnement personnalisé de leurs élèves. Cela peut être utile si la réduction des effectifs est radicale, pas en passant d’un effectif de 28 élèves à 24.

Après dix années passées à l’école et au collège, comment ces jeunes vivent-ils l’heure de l’orientation, en fin de 3e ?

C’est un moment couperet, celui du grand partage entre ceux qui vont pouvoir être orientés dans l’enseignement général et technologique et les autres, qui année après année ont accumulé un retard académique et seront orientés vers l’enseignement professionnel. Le plus souvent contre leur gré. Nombre de ces adolescents mal orientés n’ont pas de grosses lacunes dans leur apprentissage, mais ils se sentent dévalués parce que placés dans une classe poubelle.

Peut-on lier les émeutes de Nanterre de cet été à cet état des lieux ?

Il peut y avoir des causes conjoncturelles, comme cela a déjà été le cas en 2005 à Clichy-sous-Bois [Seine-Saint-Denis] , après la mort de deux adolescents. Mais, dans le fond, les émeutes vont toujours se développer sur un terreau favorable. C’est le mécontentement de jeunes gens désœuvrés qui n’ont pas pu s’intégrer à l’école. Ensuite, le fait de ne pas avoir de diplôme constitue une barrière qui les maintient éloignés d’une insertion professionnelle. Ils ont la rage contre un système qui ne les a pas bien traités et ne les reconnaît pas.

  • Camus (il, lui)OP
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    1 year ago

    Tu as toujours des liens super intéressants, as-tu une sorte de wiki privé où tu les collectes?

    • le_pouffre_bleu@slrpnk.net
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      1 year ago

      Des dossiers de favoris pas très bien organisés, de mémoire aussi de ce que j’ai lu sur les sujet qui m’intéressent.

      divulgâche

      Je passe globalement trop de temps à m’informer sur divers sujets au lieu de faire des chose plus importante, mais ça reste entre nous