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    4 months ago

    Alors que la France est tenue en haleine depuis un mois par le chaos politique à la suite de la dissolution de l’Assemblée nationale, le chaos climatique a continué de s’intensifier.

    Juin 2024 a été le mois de juin le plus chaud jamais enregistré à l’échelle mondiale, marquant le treizième mois consécutif à connaître un tel record. Des mégafeux de forêts ravagent depuis plusieurs semaines la Californie, le Brésil, la Grèce et même le nord-est de la Sibérie. Début juillet, l’ouragan Beryl a dévasté certaines îles des Caraïbes. L’Inde et le Pakistan subissent pour leur part des vagues de chaleur hors-norme.

    En France, dix jours avant le premier tour des élections législatives, le Haut Conseil pour le climat a rappelé que, dans une Europe qui se réchauffe deux fois plus vite que le reste du globe, les inégalités d’exposition face aux dérèglements climatiques « risquent de s’aggraver », notamment pour les enfants et les ménages français.

    Face à la surchauffe planétaire, la vigie française du climat a exhorté l’État à accélérer son action climatique. C’est que le paysage des politiques vertes laissé par le gouvernement Attal est en ruine. Ce dernier a, en février, amputé de 2,2 milliards d’euros le budget dédié à l’écologie. En dépit des obligations législatives, des textes-cadres pour répondre à l’urgence climatique n’ont toujours pas vu le jour, à l’instar de la loi de programmation énergie et climat ou du Plan national d’adaptation au changement climatique.

    Crash des politiques transports C’est tout particulièrement dans les transports, pourtant le premier secteur émetteur en France – 34 % des émissions brutes nationales –, que le dernier gouvernement s’est illustré pour son inaction.

    En tant que ministre de l’économie, Bruno Le Maire a accordé, en 2020, 23 milliards d’euros aux industries automobile et aéronautique sans aucune conditionnalité écologique. Le président Emmanuel Macron a, en septembre 2023, affirmé à la télévision « adorer la bagnole », et le ministère des transports s’est obstiné à défendre l’absurde projet d’autoroute A69 entre Toulouse et Castres.

    En France, les cadres supérieurs volent 17 fois plus que les ouvriers.

    Même l’idée d’un ticket transports publics universel, pour tous les âges et sur toute l’année, à l’image de ce qu’a déployé l’Allemagne, s’est finalement réduite au lancement d’un modeste « Pass rail » réservé aux 16-27 ans durant l’été.

    Le pire concerne l’aviation. La seule stratégie pour ce secteur est constituée, toujours selon le Haut Conseil pour le climat, « par la feuille de route élaborée par la filière et par le plan France 2030 pour financer un avion bas carbone. […] aucune action ou stratégie pour maîtriser la demande ou l’accompagner n’est prévue. Le secteur, dans sa feuille de route, appelle au contraire à un soutien de la demande plutôt que de préparer une trajectoire plus sobre des déplacements ».

    La situation est si critique que l’organisme scientifique français estime que le rythme de réduction des émissions du secteur des transports doit tripler à l’horizon 2030 pour répondre à l’urgence climatique.

    Voler, un luxe pour riches Bien loin des fausses promesses d’un futur « avion vert », qui ne reposent que sur des hypothèses de progrès technologiques à long terme, un des premiers gestes climatiques forts en matière de transport pour la nouvelle législature serait d’interdire les jets privés.

    Cette proposition politique, déjà lancée par les écologistes et refusée à l’Assemblée en avril 2023, remettrait au centre du débat écologique la responsabilité différenciée des Français·es face au chaos climatique, en pointant l’élitisme du transport aérien.

    Dans un geste de justice sociale et climatique, une telle interdiction des jets montrerait qu’il est symboliquement possible de mettre fin à l’impact disproportionné des plus aisé·es sur la planète.

    Car c’est bien une question sociale qui se cache derrière l’aviation, et tout particulièrement les jets privés.

    Voler reste un luxe pour riches. 1 % de la population mondiale représente 50 % des émissions de l’aviation commerciale. Et chaque année, environ 90 % des habitant·es du globe ne prennent pas l’avion.

    Même en France, l’avion demeure un mode de transport pour privilégié·es. À peine 29 % des Français·es s’achètent un billet d’avion au moins une fois par an, et les cadres supérieur·es volent 17 fois plus que les ouvriers et ouvrières.

    Des tasses « J’aime l’odeur du kérosène le matin » à l’Ebace de Genève, plus gros salon de l’aviation d’affaires en Europe, en mai 2024. © Photo Alberto Campi / We Report Le contre-sens écologique et social de l’aviation est total car pour atteindre nos objectifs climat, les 10 % de la population française les plus aisés doivent réduire de 81 % leur empreinte carbone, tandis que les 50 % les plus pauvres doivent la diminuer de seulement 4 %.

    Bannir les jets privés constituerait ainsi un « minimum syndical » écologique, puisque les trajets en jets privés, effectués par une poignée d’ultrariches, sont 5 à 14 fois plus polluants par passager que les avions commerciaux, et 50 fois plus émetteurs que les trains. Et ce, dans un contexte où, en Europe, les émissions de CO2 de ces avions pour privilégié·es ont augmenté de près d’un tiers entre 2005 et 2019.

    À lire aussi Climat : les trajets délirants des jets des millionnaires Cette mesure ferait d’autant plus sens que les deux plus gros aéroports d’affaires d’Europe sont français : Paris-Le Bourget et Nice-Côte d’Azur. À l’échelle globale, la croissance des mobilités aériennes est telle que le secteur aérien mondial prévoit déjà pour 2024 près de 5 milliards de passagers transportés. Un record.

    Dans un geste de justice sociale et climatique, une telle interdiction des jets montrerait qu’il est symboliquement possible de mettre fin à l’impact disproportionné des plus aisé·es sur la planète. Et qu’en ces temps de montée du fascisme comme des températures, il est urgent de faire réatterrir les plus riches sur terre.