La ministre wallonne de l’Environnement Céline Tellier a reçu plusieurs alertes sur un taux élevé de PFAS dans l’eau de certaines zones wallonnes.

La ministre wallonne de l’Environnement Céline Tellier (Ecolo) s’est expliquée, ce mardi au Parlement régional, sur la crise de la pollution aux PFAS en Wallonie. " C’est une lutte de “David contre Goliath, face à l’industrie chimique qui met sur le marché 5.000 substances potentiellement néfastes”. "

Céline Tellier

Ministre wallonne de l’Environnement

Sa défense s’est principalement basée sur l’existence d’une zone grise, entre les connaissances continuellement actualisées et la mise en place, par les autorités publiques, d’un arsenal de mesures pour intervenir sur plan légal. Et cette zone grise constitue le moment le plus difficile pour communiquer efficacement, selon la ministre. Pour elle, c’est une lutte de “David contre Goliath, face à l’industrie chimique qui met sur le marché 5.000 substances potentiellement néfastes”.

Un courrier pas assez clair?

Que savait vraiment Céline Tellier? Elle a assurément été informée, à plusieurs reprises. En juillet 2021, le député PTB Jori Dupont avait notamment mené une interpellation au Parlement wallon sur base d’un rapport de 2017 rédigé par la Défense américaine sur la mauvaise qualité des eaux de la base de Chièvres. Suite à cela, des analyses de l’eau avaient été demandées par le cabinet Tellier. Les résultats de six PFAS étaient arrivés en septembre et considérés comme “rassurants”. " “À la question de savoir si j’ai été alertée par ces valeurs et si j’ai sciemment pris la décision de ne pas informer la population ni la commune, la réponse est clairement non.” "

C’est en janvier 2022 qu’un couac s’est produit, quand le cabinet de la ministre a reçu un certain mail de l’administration. Pour Céline Tellier, le message n’a pas suivi l’ordre hiérarchique. Il “ne comprend aucune analyse de données, pas d’alerte ni proposition d’action ou de suivi”. C’est une transmission d’information “comme il peut en exister des centaines par mois”. Bref, le mail n’a pas vraiment reçu une grande attention. Erreur.

En annexe se trouvait un tableau Excel, garni de nombreuses colonnes. La dernière donnait la valeur relative à la somme des 20 PFAS. Le chiffre était bien supérieur à la future norme européenne de 100 ng/L… Mais ce dépassement n’est nullement relevé clairement dans le courrier et personne n’a tiqué sur ce chiffre élevé.

“À la question de savoir si j’ai été alertée par ces valeurs et si j’ai sciemment pris la décision de ne pas informer la population ni la commune, la réponse est clairement non”, a assuré la ministre. " “Vous avez toutes les alertes qu’il fallait.” "

Éviction d’un expert

Céline Tellier n’a donc pas nié ces alertes, mais a tenté d’expliquer pourquoi celles-ci n’avaient pas reçu de sa part la fermeté de réponse qui semble aujourd’hui s’imposer. Ses réponses n’ont visiblement pas satisfait l’assemblée.

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“Qu’est-ce qu’il vous faut pour être alertée?”, a lancé le député PTB Jori Dupont. Il rappelle le rapport américain, le scandale 3M, son intervention au Parlement et les courriers de la ministre flamande Zuhal Demir. “Vous aviez toutes les alertes qu’il fallait.”

La ministre aussi revenue sur l’éviction de son collaborateur expert de l’eau, suite à la révélation de cette pollution. Elle lui reproche un manque de “vigilance politique.” Il ne s’agit pas pour elle de “désigner un coupable, mais de travailler en confiance dans l’avenir”.

Davantage de sécurité?

Aujourd’hui, les Wallons ne sont guère rassurés quant à la qualité de l’eau du robinet. Et l’argument du mail peu explicite sème le doute quant à la vigilance de l’administration et du cabinet de la ministre. Or, les élections du 9 juin approchent.

99,5%

27% de l’ensemble du réseau de distribution a été analysé par la SWDE, avec un taux de conformité de 99,5% par rapport à la future norme européenne.

Céline Tellier tente donc de restaurer la confiance dans un domaine qui est la raison d’être de son parti, en lançant des actions qui devraient permettre de mieux cerner et prévenir cette pollution de l’eau par les PFAS. Elle veut accélérer le monitoring, pour que 100% de la Wallonie soit rapidement couverte. Des prises de sang vont être proposées aux populations des zones polluées.

Aujourd’hui, 27% de l’ensemble du réseau de distribution a été analysé par la SWDE, avec un taux de conformité de 99,5% par rapport à la future norme européenne de 100 ng/L. Un “léger dépassement” avait été constaté à Ronquières (106), redescendu à 86 à la fin octobre.

Des seuils de vigilance seront mis en place pour l’eau potable: 30 ng/L pour les 20 PFAS repris dans la norme européenne et 4 ng/L pour les quatre PFAS les plus préoccupants. Le but: avertir citoyens et communes.

La ministre verte souhaite aussi l’accélération du cadastre pour la cartographie des sols, eaux souterraines, etc.

Une analyse des entreprises utilisant des PFAS ou traitant des matériaux qui emploient ces polluants doit être lancée afin de voir si une procédure “Article 65” s’impose, enclenchant une mise à jour des conditions d’exploitation des permis.

Un conseil scientifique indépendant qui conseillera le gouvernement et l’administration sur les PFAS est aussi envisagé.

Le résumé

La ministre wallonne de l'Environnement s'est expliquée sur sa gestion de la pollution de l'eau par les PFAS.
Un mail comportant un tableau Excel aurait dû ranimer sa vigilance début 2022, mais celui-ci est tombé aux oubliettes, à cause de son manque de clarté.
La ministre tente de restaurer la confiance en lançant diverses opérations pour un meilleur suivi de la concentration en PFAS dans l'eau.